COLLOQUE Républicain.e.s espagnol.e.s exilé.e.s pendant la Seconde Guerre mondiale. Travail forcé et résistances. Rotspanier, 80 ans après

Le laboratoire HTCI de Université de la Bretagne Occidentale, en partenariat (entre autres) avec l’association Mémoire de l’Exil Républicain Espagnol dans le Finistère, MERE29 nous prépare un colloque international où participent des membres du CERMI : Ivan Lopez Cabello qui organise, Geneviève Dreyfus-Armand qui fait la conférence d’ouverture, présentée par Odette Martinez-Maler.

Un programme très alléchant, à ne pas manquer, d’autant que les conférences seront également diffusés en ligne sur le lien :

https://www.youtube.com/channel/UCVQf-gbC2lvJCCRhlpxhT_w

Quand ? Les 17, 18 et 19 mars 2022

Où ? A Brest , Faculté de Lettres et Sciences humaines Victor Segalen (salle B001), 20 rue Duquesne, Brest

L’exposition « Rotspanier » conçue par Peter Gaida et Antonio Muñoz Sanchez avec l’appui de l’association Ay Carmela Bordeaux et le soutien de la Foundation EVZ sera visible à l’abri Sadi Carnot à partir du 18 mars 2022 et jusqu’au 15 avril 2022

EXPOS sur l’exil républicain espagnol

L’Association 24 août 1944 et Les Territoires de la Mémoire (Liège) vous proposent
deux expositions photographiques sur l’exil républicain espagnol

https://exiles.territoires-memoire.be/

https://www.24-aout-1944.org/EXILES-des-resistants-de-la

EXILÉS, des résistants de la Retirada à aujourd’hui

Chemins de l’exil. Philippe Gaussot.

L’exode de 500.000 Espagnols passant les Pyrénées en Février 1939, plus connu aujourd’hui sous le nom de «Retirada », a été très documenté principalement par des photographes tels que Robert Capa ou Agusti Centelles ainsi que par de nombreux autres restés anonymes.

Le témoignage photographique de Philippe Gaussot, resté inédit jusqu’en 2019, porte un regard non seulement sur ce passage de la frontière mais aussi sur les conditions dramatiques de « l’accueil », quelque peu effacé, à même le sable des plages du Roussillon. Enfin ses pas, d’humanitaire, dirait-on aujourd’hui, l’ont mené à recueillir les regards et les visages des enfants basques et catalans accueillis, en l’occurrence par l’action du Comité National Catholique.

La sangre no es agua. Le sang n’est pas de l’eau. 

de Pierre Gonnord.

Le reportage photographique de Pierre Gonnord a été effectué en 2019. Pierre Gonnord s’est intéressé à ce qu’étaient devenus ces défenseurs de la Liberté, pour celles et ceux encore en vie mais aussi à leurs enfants.

Comment chez ces exilés, l’histoire familiale a charrié leur mémoire mêlée à la grande Histoire, qu’ont-ils fait de leurs expériences et quelle a été leur transmission ? Pierre Gonnord apporte une réponse.

Parce qu’il existe cette unité de temps, mais pas seulement, l’association 24 Aout 1944, une des porteuses de la mémoire des Républicains espagnols a voulu rassembler ces deux expositions. Celle de Philippe Gaussot nous ramène plus de 80 ans en arrière, celle de Pierre Gonnord nous laisse les traces, aujourd’hui, des derniers survivants et de celles et ceux qui ne sont plus.

Cette exposition sera accessible du 5 mars au 22 mai, avec plusieurs propositions d’animation (expositions, projections, débats, visites accompagnées…) consultez le programme sur : EXILES.TERRITOIRES-MEMOIRE.BE

– Une histoire encore si peu connue en Belgique et qui, pourtant, est très proche de nous.

– Ces expositions amènent le spectateur à réfléchir sur les exils aujourd’hui.  

– Visite animée sur la guerre d’Espagne adaptée à chaque public à partir de 15 ans à la demande

POUR ALLER PLUS LOIN 

– Rencontre – animation avec l’association « 24 août 1944 » possible, sur réservation, aux dates suivantes, heures à déterminer:  

– 31 mars, 01 avril, 02 avril 2022 

– 20, 21, 22, 23 avril 2022 

– Des activités seront organisées autour de ces deux expositions.

Pour en savoir plus, prenez-contact avec le service projets des Territoires de la Mémoire:

projets@territoires-memoire.be – 032 4 232 70 02.  

RÉSERVATIONS : 

reservation@citemiroir.be  

032 4 230 70 50 

DU 5 MARS AU 22 MAI 

Une pièce de théâtre à Mauthausen ?

Llibert Tarragó a trouvé cette pièce de théâtre dans les papiers personnels de Joan Tarragó. Le texte manuscrit est incomplet et ne mentionne ni date ni auteur (voir l’entretien avec Llibert Tarragó par Sandrine Saule, « Une pièce de théâtre à Mauthausen ? » et l’article de Llibert Tarragó « Enchevêtrement et enlacement, parfois encombrement… » dans le numéro 13/14 de la revue Exils et migrations ibériques aux XXe et XXIe siècles).

La pièce a été transcrite et traduite du catalan par Anne Charlon.

ACTE I, Scène 1, Odette et Fritz.

Odette : Tu dois en être sûr, les maquisards sont une réalité.

Fritz : Tes maquisards ne me font pas peur.

Odette : Fritz, tu ne connais pas le caractère de ce peuple.

Fritz : Écoute, Odette, ne t’inquiète pas, s’il y avait le moindre péril, la Gestapo veille.

Odette : Pourvu que tu aies raison ! Mais après l’attentat contre ce général à Paris, je suis convaincue qu’il ne s’agit pas d’un cas isolé.

Fritz : Écoute, je vais te convaincre immédiatement. (Il prend le téléphone) Allo ! Allo ! C’est toi, Julien ?… C’est Fritz… Oui… J’ai besoin de te voir immédiatement… Oui, c’est urgent… D’accord, viens ici au bureau. (Il repose le téléphone).

Odette : C’est qui, ce Julien ?

Fritz : C’est un fils de la France/ C’est un français, mais il pense en allemand.

Odette : Est-ce qu’il est sûr, au moins ?

Fritz : Comme  toi et comme moi-même. C’est un chef de la milice.

Odette : Et tu as des nouvelles de la fiancée de Jacques ?

Fritz : Ils se marient demain.

Odette : Ce n’est pas possible !

Fritz : René me l’a dit ce matin.

Odette : Puisque tu parles de René, sais-tu qu’il ne me plaît pas du tout ?

Fritz : Pourquoi dis-tu cela ?

Odette : J’ai toujours eu l’impression qu’il est plus pour les maquisards que pour nous.

Fritz : Il est bien obligé ! Un espion doit toujours démontrer le contraire de ce qu’il pense. On frappe à la porte. Entrez !  Julien entre.

Scène 2, Odette, Fritz, Julien.

Julien : Excusez-moi si j’ai mis du temps, mais j’étais en train de lire le rapport que m’a envoyé René ; il est très intéressant.

Fritz : Tu l’as apporté ?

Julien : Oui… mais…

Fritz : Tu peux parler sans crainte. Odette est au courant de tout, c’est ma collaboratrice.

Julien (sortant un papier de sa poche) : Tenez, c’est un rapport complet sur le maquis.

Fritz : Mais le maquis n’existe pas.

Julien : C’est une réalité.

Fritz : C’est précisément pour cela que je t’ai appelé. Nous ne sommes pas d’accord avec Odette et je veux connaître ton opinion.

Julien : Sur le maquis ?

Fritz : Oui. Toi, tu crois à ces histoires ?

Julien : J’en suis absolument sûr et, de plus, le rapport est très clair.

Odette : Tu ne voulais pas me croire mais les faits vont te convaincre.

Fritz (il lit le rapport) : Après avoir filé de nombreuses fois des individus que je soupçonnais, j’ai découvert qu’un dénommé Alexandre est en relation avec des maquisards. C’est lui qui transmet les ordres du maquis à la résistance qui s’est formée dans la ville.  C’est un individu très dangereux et malin. Je n’ai pas pu l’approcher mais je suis sûr que la Gestapo pourrait le faire parler. Quant au dénommé Jacques, je n’ai rien pu découvrir de concret mais je crois que, vu son état de santé, il a besoin de changer d’air. A Cherbourg ou dans le Pas de Calais, car je suis sûr que s’il n’est pas encore partie prenante dans le maquis, il ne va pas tarder à y entrer. ( S’adressant à Julien) Débrouille-toi pour m’amener cet Alexandre. Je découvrirai ce qu’il a dans le ventre.

Odette : Je le connais et je t’assure qu’il ne se fera prendre que par surprise.

Fritz (qui sonne) : Tu as besoin de combien d’hommes, Julien ?

Julien : Il vaudrait mieux que je ne participe pas.

Fritz : Tu as peur ?

Julien : Non, mais s’ils me voient, c’en est fini du travail utile que je peux faire pour la cause que nous défendons.

Fritz : Tu as raison. Il vaut mieux que tu continues ton travail sans qu’ils sachent qui tu es. C’est bon. (On frappe à la porte. Entre un soldat allemand.) Préviens l’officier de garde. (Le soldat salue et sort.)

Julien : Est-ce que je donne d’autres ordres à René ?

Fritz : Non. Qu’il continue de surveiller Jacques.

Julien : Cela lui sera facile. Ils sont très amis. C’est son témoin demain, pour son mariage.

Odette : Il se marie finalement avec cette Espagnole ?

Julien : Oui, Maria et il va s’occuper de sa cousine Rosa. Et le Gestapo s’occupera d’eux trois. Ils rient.

(On frappe. Entre un officier.)

Fritz : Prenez toutes les précautions et ne revenez pas avant de m’amener l’individu que vous indiquera le guide que vous donnera Mr Julien (traduction incertaine …i no torneu sense portar-me l’individuo que vos indicara el guia que vos donarà M. Julien)

Officier : Et s’il résiste ?

Fritz : Vous connaissez votre devoir.

(L’officier sort.)

Julien : Je vais désigner un homme qui les accompagnera. Autre chose ?

Fritz : Non et s’il se passe du nouveau, je vous préviens.

(Julien sort.)

Odette : Tu vois, j’avais raison quand je te disais que c’est bien organisé.

Fritz : Ne t’en fais pas, bientôt je les aurai bien désorganisés. (La porte s’ouvre. Entre le général Von Artek.) A vos ordres, mon général.

Artek : Je viens de voir l’officier avec 12 soldats, il se passe quelque chose ?

Fritz : Ils sont allés arrêter un type dangereux qui, d’après nos informations, est en relation avec les maquisards.

Artek : Qui est cette dame ?

Fritz : Je voulais précisément vous la présenter. C’est ma meilleure collaboratrice. Odette, voici le général Von Artek.

Odette : Mon général, c’est un grand honneur pour moi.

Artek : Enchanté de faire votre connaissance. Dans un moment nous passerons dans mon bureau, j’ai des choses à vous dire.

Odette :  Je suis à vos ordres.

Artek (s’adressant à Fritz) : Quand l’individu arrivera, prévenez-moi, je veux assister à son interrogatoire.

Fritz : A vos ordres, mon général. (Le général sort.)

Odette : Il m’est très sympathique, tu sais.

Fritz (il lui prend les mains) : Ecoute, Odette,  jure-moi que quoi qu’il arrive, tu es seulement à moi.

Odette : Qu’est-ce qui te prend ?

Fritz : Dans quelques instants, tu vas aller dans son bureau.

Odette : Tu es jaloux ?

Fritz : (riant) : Si tu me trompais…

Odette : Que ferais-tu, si je te trompais ?

Fritz (la prenant par la taille) : N’oublie pas que je suis le chef de la Gestapo et que…

Odette : Tais-toi ! Tais-toi ! (Elle l’embrasse)

Fritz : Vassy ! Ne le fais pas attendre mais n’oublie pas que je ne pardonne pas.

Odette : Même à un général ? (Elle sort)

Fritz (seul) : Non, pas même à un général. Cette femme est comme un venin dans ma vie et pour elle je serais capable de tout. Si Von Artek la convainc… Mais non, elle m’aime et, en même temps, elle me craint. Mais les femmes sont faibles et du seul fait que c’est un général, elle est capable de… Non, je ne veux pas y penser, cela me fait bouillir… Non elle est à moi, elle sera à moi et, s’il veut me la prendre, malheur à lui !(On frappe à la porte.) Entrez ! (L’officier entre.) Vous avez exécuté mes ordres ?

L’officier : Oui. Le prisonnier est ici.

Fritz : Il a résisté ?

L’officier : Il n’a pas eu le temps. Il était au bureau de tabac. Le guide/l’indic nous l’a montré et, quand il est sorti, nous l’avons encerclé. Je l’ai fouillé immédiatement et il portait sur lui un pistolet mitrailleur anglais mais il n’a pas eu le temps de le sortir.

Fritz : Alors il avait une arme anglaise !

L’officier : Oui et je vous assure qu’apparemment, s’il en avait eu l’occasion, il s’en serait servi.

Fritz : Bien ! Faites-le entrer et faites venir les deux soldats qui vont s’occuper de lui.

L’officier : A vos ordres ! Vous avez besoin d’autre chose ?

Fritz : Tenez-vous prêts pour une rafle.

L’officier : Si vous me permettez, je vous dirai que le type en question ne semble pas être de ceux qui parlent.

Fritz : Je ne vous ai pas demandé votre avis. Faites-le entrer et attendez les ordres ! (L’officier salue et s’en va. Aussitôt après, entre Alexandre menotté et encadré de deux soldats.)

Voici donc le fameux Alexandre qui se permet d’organiser la résistance contre les troupes d’occupation.

Alexandre : Je ne sais pas de quoi vous me parler.

Fritz(il lui donne une gifle) : Comme cela tu apprendras à parler seulement quand je te le demande… Qui sont tes complices ? Réponds ! (Il lui donne un coup de poing.) Tu ne veux pas répondre !

Alexandre : Vous êtes un lâche.

Fritz (riant) : Tu te crois très courageux !

Alexandre : Je suis un homme honorable et c’est un courage que tu n’auras jamais, canaille !

Fritz (qui commence à le frapper) : Je vais te montrer ce que cela rapporte de m’insulter (s’adressant aux soldats) Préparez-vous pour un gentil petit interrogatoire. (Les soldats enlèvent leur veste et prennent chacun un fouet. Ils commencent à le frapper. La porte s’ouvre, entre René. Quand Alexandre le voit il semble étonné et René lui fait signe de ne rien dire.)

René : Qui est cet individu ?

Soldat : Quelqu’un qui se croit très fort mais je crois qu’il va bientôt changer d’idées. (Il lui donne un coup de fouet.)

René : Arrêtez ! Laissez-moi avec lui.

Soldat : Nous avons des ordres…

René : Je vous ai dit de sortir ! (Les soldats sortent.) Alexandre, comment se fait-il qu’ils t’aient pris ?

Alexandre : Et toi, qu’est-ce que tu fais ici ?

René : J’obéis aux ordres du maquis, je me fais passer pour un mouchard afin de connaître leurs intentions.

Alexandre : Qui est ton chef ?

René : Je reçois mes ordres par l’intermédiaire d’une jeune fille qui vit dans une ferme.

Alexandre : Je te demande qui est ton chef.

René : Je le connais sous le nom de Michel.

Alexandre : C’est bon.

René : Tu le connais ?

Alexandre : Celui que je connais, c’est toi, espèce de traitre !

René : Je t’assure que tu te trompes, tu peux sauver ta peau.

Alexandre : Oui, en te donnant le nom des camarades pour que tu les vendes comme tu m’as vendu.

René : Tu es injuste, mais je te promets de te prouver bientôt que tu te trompes.

Alexandre : Un Français vendu aux Allemands ! Assassin !

René (en colère) : Ah ! tu ne veux pas me faire confiance, eh bien tu vas voir si tu en as pour les bourreaux qui vont entrer.

Alexandre : Je ne crains aucune torture. (La porte s’ouvre. Entrent Von Artek, Odette et Fritz)

Fritz (à René) : Qu’est-ce que tu fais là ? Où sont les soldats que j’ai laissés ?

René : C’est moi qui leur ai dit de sortir un moment, j’essayais de le convaincre, mais c’est inutile.

Fritz : Sortez et faites revenir les soldats.(René s’apprête à sortir.)

Von Artek : Attendez ! De quel droit donnez-vous des ordres à un soldat allemand ?

René : Mon général… c’était… pour mieux vous servir.

Fritz (le frappant) : Taisez-vous.

Von Artek sonne et un soldat entre :Emmenez cet homme et tenez-le sous bonne garde, je l’interrogerai plus tard. René sort empoigné par un soldat.

Odette (à Fritz) : Je te le disais bien qu’il ne m’inspirait pas confiance.

Fritz : C’est toi qui a parlé de lui au général ?

Odette : Je veille sur toi et je défens notre cause.

Fritz : Fais attention !

Von Artek à Alexandre : Voyons, nous devons parler un peu tous les deux.

Alexandre : C’est inutile, nous n’avons rien à nous dire.

Von Artek : Si tu parles, c’est la liberté, la richesse et tout ce que tu peux désirer, si non…

Alexandre (ironique) : Aucun plaisir ne me tente, je ne crains pas la torture, faites de moi ce que vous voulez.

Von Artek : Réfléchis ! Nous sommes les plus forts. Que pouvez-vous faire, quelques milliers d’hommes, contre nos divisions ?

Alexandre : Nous mourrons s’il le faut mais un jour viendra où la raison et le justice triompheront.

Fritz : Mon général, les soldats chargés de l’interroger attendent à la porte.

Von Artek : Inutile. Conduisez cet homme à la prison en attendant mes ordres.

Fritz (il sonne et les soldats entrent) : Emmenez le prisonnier et veillez à ce qu’il ne s’échappe pas. Ils l’emmènent.

Von Artek : Fritz, allez chercher vous-même René. Fritz sort. Venez ici, Odette. Il l’assoie sur ses genoux. Sais-tu que tu me plais de plus en plus ?

Odette : Prenez garde mon général, si Fritz entrait…

Von Artek : Est-ce que Fritz te fait peur ou bien est-ce que tu l’aimes vraiment ?

Odette : Il m’a menacée si je le quittais…

Von Artek : Ne t’inquiète pas, je trouverai l’occasion de l’envoyer loin.

Odette : Vous vous priveriez de ses services pour moi ?

Von Artek : Quand quelque chose en vaut la peine, je ne lésine pas sur les moyens. Il l’embrasse. On entend des pas et Odette se lève. Fritz entre accompagné de René.

Fritz : Mon général.

Von Artek à René : Depuis quand travaillez-vous pour la Gestapo ?

René : Depuis le début de l’occupation.

Von Artek : Alors vous connaissez le sort réservé aux traitres, hein ?

René : Oui, mon général, la mort.

Von Artek : Pourrais-tu me dire ce que tu faisais la nuit dernière avec trois individus à qui tu parlais à la sortie du village ?

René (tremblant) :  Mon général… j’essayais de… connaître leurs intentions.

Artek : Eh bien moi je connais les tiennes. Tu joues un double jeu et, avec tous ces jeux, tu as perdu. (A Fritz) Emmenez-le et liquidez ce traitre !

René : Mon général, ne me condamnez pas, je vous jure que je serai toujours le plus fidèle de vos serviteurs.

Artek : Cela suffit. Je ne donne qu’un ordre et, quand je le donne, je veux qu’il soit exécuté sur le champ. (A Fritz) Faites ce que je vous ai dit ! (Fritz attrape René par le bras et l’emmène, au bout d’un moment on entend un coup de feu et Fritz entre. Il trouve le général et Odette enlacés et il ressort sans rien dire.

Odette : Si Fritz nous voyait, il serait capable de tout.

Artek : A présent tu vas t’en aller et nous nous retrouverons ce soir pour souper, d’accord ?

Odette : D’accord.

A ce moment on entend des bruits de pas et des cris. Entre Fritz.

Fritz : Mon général, le prisonnier Alexandre s’est échappé !

Artek : Et les soldats qui l’accompagnaient ?

Fritz : Ils sont morts. Ils ont été attaqués par un groupe de maquisards.

Artek : Qu’on fusille 50 otages au milieu de la place. Ils apprendront ainsi ce que vaut la vie d’un Allemand. Donnez les ordres nécessaires et restez ici, je pourrais avoir besoin de vous. Odette, j’ai été enchanté de faire votre connaissance, j’espère que nous aurons l’occasion de nous revoir. Il sort.

Fritz, l’attrapant parle bras : Alors comme ça , il est ravi de faire ta connaissance, hein !

Odette le cajolant : Mais ne sois pas jaloux, c’est normal et cela n’a rien d’extraordinaire.

Fritz : Tu dîneras avec moi, ce soir ?

Odette : Impossible. J’ai une mission à accomplir et je dois rentrer chez moi pour faire le nécessaire.

Fritz : Quelle est cette mission ?

Odette (riant) : Une mission secrète. Ordre du général Von Artek.

Fritz : Comme tu voudras. Mais aujourd’hui le village est très excité et je vais te faire accompagner. (Il sonne et un soldat entre) Accompagnez cette dame et venez me rendre compte à la fin de votre service.

Odette : Je ne crois pas qu’il y ait de danger, je peux y aller seule.

Fritz : J’ai si peur de te perdre que je préfères que l’on t’accompagne, je ne serai pas tranquille tant que je ne te saurai pas en lieu sûr. A demain, Odette. (Elle sort accompagnée du soldat.) (rageur) Ils me prenaient pour un imbécile ; elle se voyait déjà maîtresse d’un général, mais Fritz veille. Il peut l’attendre à l’hôtel, s’il ne va pas la chercher parmi les 50 otages, il va l’attendre longtemps. Ah, Ah, Ah ! Pour le moment c’est elle qui paie, ensuite nous verrons qui est le plus fort du général qui commande la place ou du chef de la Gestapo.

RIDEAU

ACTE II   Scène 1, Maria et Rosa.

Maria : Cela fait deux jours que Jacques est parti et nous n’avons pas de nouvelles.

Rosa : Ne t’inquiète pas, Maria, tu sais que le jeune homme envoyé par Alexandre nous a dit de ne pas nous en faire, ils veillent et à la première occasion ils le feront échapper.

Maria : Tu peux dire ce que tu veux mais avec l’affaire des otages, la peur ne me quitte pas.

Rosa : Puisque tu parles des otages, j’ai appris aujourd’hui qu’Odette se trouvait parmi ceux qui ont été exécutés sur la place.

Maria : C’est impossible, elle travaillait pour la Gestapo.

Rosa : A ce sujet il court différents bruits et il y en a qui disent que c’est une histoire de jalousie.

Maria : De jalousie ?

Rosa : Oui. Il paraît qu’elle voulait profiter des deux chefs, du général et du chef de la Gestapo.

Maria : Tu vois comment sont les choses. Une fille qui ne sortait jamais, qui n’allait ni au bal ni au cinéma et ne faisait qu’accompagner sa mère.

Rosa : Pauvre femme ! La contrariété de voir la vie que menait sa fille l’a rendue folle.

On frappe

Maria : Qui cela peut-il être à une heure pareille ? Il est presque 11 heures.

Rosa : Ne dis rien. Ils penseront que nous sommes sorties et s’en iront.

On frappe à nouveau, cette fois trois coups puis un.

Maria : Va ouvrir, c’est le signal convenu.

Rosa va ouvrir. Entre Alexandre.

Scène 2. Maria, Rosa et Alexandre.

Alexandre : Bonsoir. Je vous ai fait peur ?

Maria : Oh Alexandre, pourquoi t’exposes-tu ainsi ?

Alexandre : N’aies pas peur, personne ne viendra. Toutes les rues sont gardées par mes hommes.

Maria : Et Jacques ?

Alexandre : Il est parti avec un groupe de travailleurs pour le Pas-de-Calais.

Rosa : Pauvres de nous avec tous les bombardements qu’il y a là-bas !

Alexandre : Ne vous en faites pas, deux camarades ont réussi à s’infiltrer et à la première occasion, ils le ramèneront. Je ne serais pas étonné s’il était ici dans deux ou trois jours ou peut-être demain.

Maria : Dans ma hâte d’avoir des nouvelles de Jacques, je ne t’ai même pas proposé de t’asseoir. Rosa va réchauffer le souper pour Alexandre.

Alexandre : Pas question ! Ne vous dérangez pas ! Dans 5 minutes nous devons avoir quitté le village.

Rosa : Ce sera tout de suite prêt.

Alexandre : Les camarades se sont déjà regroupés et je dois les rejoindre.

Maria : Que prépares-tu ?

Alexandre : Venger les camarades fusillés l’autre jour.

Maria (le prenant par le bras) : Tu m’as dit l’autre jour de ne pas me fier à René. Que sais-tu de lui ?

Alexandre : Ne t’inquiète plus pour cela. Ce que je regrette c’est que nous ne soyons pas arrivés assez tôt pour faire justice nous-mêmes.

Rosa : Il s’est enfui ?

Alexandre : J’ai appris par un soldat polonais qui est de notre côté que le général, se doutant qu’il jouait double jeu, l’a fait fusiller.

Rosa : Je n’aurais jamais cru qu’il nous trahissait. Il avait l’air d’un brave garçon.

Alexandre : Il ne faut jamais se fier aux apparences. (On entend quelqu’un siffler) C’est le signal. Tout est prêt, je dois partir. (Il tend la main à Maria.) Au revoir Maria, au revoir Rosa. Courage et… (On frappe. Alexandre prend son revolver et écoute à la porte, on entend le signal réglementaire. Alexandre ouvre en gardant le revolver à la main et Jacques entre.) Toi !

Maria et Rosa se jettent à son cou.

Scène 3, Alexandre, Jacques, Maria et Rosa.

Maria : Jacques !

Jacques : Oui Maria, c’est moi, je reviens près de toi.

Alexandre : Je ne t’attendais pas avant demain au plus tôt.

Jacques : Nous avons profité d’un mitraillage de la RAF contre un convoi de camions juste à côté de la voie ferrée. Comme le train s’est arrêté nous avons sauté et réussi à nous échapper à travers champs.

Alexandre : Et les deux camarades qui étaient avec toi ?

Jacques : Ils nous attendent avec le groupe.

Rosa : Tu as dit ils nous attendent. C’est que tu comptes repartir ?

Jacques : Ne vous en faites pas. D’ici peu nous serons de retour.

Maria : Vas-y, Jacques. Ton devoir de patriote passe avant ton devoir de mari.

Jacques :  J’aime t’entendre parler ainsi, Maria. Mais dis-toi que bientôt ce sera l’heure de la victoire que nous avons tant désirée et alors je reviendrai pour toujours et rien ne pourra nous séparer.

Rosa : Mais, Jacques, si par malheur…

Maria : Tais-toi, Rosa. Il ne doit rien arriver de mal. Pars, Jacques. Pour le moment ta place n’est pas ici. (Elle l’embrasse.)

Alexandre : Tu as une arme ?

Jacques : Les camarades que tu as envoyés avec moi m’ont donné ce joujou. (Il sort un revolver.)

Alexandre : En avant pour la liberté !

Jacques (Il serre les deux femmes dans ses bras.) : Soyez sans crainte. Celui qui lutte pour la raison et la justice est toujours le plus fort.

Alexandre et Jacques sortent.

Scène 4, Maria et Rosa.

Rosa : J’ai peur.

Maria : Ne crois pas que je sois tranquille mais, vois-tu Rosa, les hommes qui luttent pour une cause noble doivent pouvoir toujours compter sur l’amour des leurs. Ne leur laisse jamais découvrir tes souffrances, pense que s’ils luttent et s’ils s’exposent c’est pour éviter les souffrances de tout un peuple.

Rosa : Je t’admire, Maria. Dorénavant tu n’entendras plus un seul mot pessimiste sortir de ma bouche devant eux. Mais ici, entre nous, que se passerait-il si Jacques avait le malheur de tomber ?

Maria : Ecoute, Rosa, je pense que cela n’arrivera pas, mais si c’était le cas je préfère cent fois être la veuve d’un héros que la femme d’un lâche.

On entend des coups de feu. Les deux femmes se serrent dans les bras l’une de l’autre. Un moment de silence.

Rosa : Je vais voir si je peux apprendre quelque chose.

Maria : Non, Rosa, ne sors pas, il est plus de onze heures et le couvre-feu commence à 10.

 Rosa : C’est que je ne serai pas tranquille tant que… (On frappe en respectant le signal.)

Maria : Va ouvrir, ce sont eux. (Rosa ouvre. Entre un maquisard.) Et Jacques ?

Maquisard : Il est avec le groupe qui a couvert la retraite d’Alexandre.

Maria : Tout a marché comme vous le vouliez ?

Maquisard : Oui. Le général qui a donné l’ordre de fusiller nos camarades ne fera plus fusiller personne.

Rosa : Vous l’avez tué ?

Maquisard : Nous avons fait justice.

Maria : C’est Jacques qui t’envoie ?

Maquisard : Oui. Il m’a demandé de vous dire de ne pas vous inquiéter ; il rejoint le maquis et ce sera lui qui transmettra les ordres à celui qui reste ici à la place d’Alexandre.

Rosa : Alexandre part ?

Maquisard : Après son arrestation et sa fuite, il ne peut pas rester ici.

Rosa : Bien sûr ! Je suis idiote.

Maria : En cas de problème, comment pourrai-je vous avertir ?

Maquisard : Il y aura quelqu’un qui passera toutes les nuits dans les rues. S’il se passe quelque chose d’important, mettez une pierre à côté de la porte. En cas de danger, entrouvrez une fenêtre.

Maria : Compris. Tu as soupé ?

Maquisard : Ne vous en faites pas ! Pendant que nous faisions ce que nous avions à faire, un autre groupe nettoyait l’intendance. Bon ! A la prochaine. (Il donne la main à Maria et Rosa.)

Maria : Au revoir et bonne chance. Dis à Jacques de me faire parvenir des nouvelles quand il pourra.

Rosa : Tu pars tout seul…

Maquisard : Il y a deux camarades qui m’attendent en bas. Au revoir. (Il s’en va.)

Maria et Rosa

Maria : Allez, Rosa, va te coucher, il est tard.

Rosa : Et toi, tu ne viens pas ?

Maria : Je vais rester encore un peu pour avancer les pullover que je tricote.

Rosa : Ne tarde pas trop. (Elle l’embrasse.)

Maria : Va te reposer. (Rosa sort.) Quand mon martyre finira-t-il ? Toute une vie d’angoisse ! Quand j’étais petite, mon père qui luttait pour le bien-être de la classe ouvrière a été assassiné par une main criminelle. Nous avons juré de le venger, mes deux frères et moi. Nous avons continué la lutte à sa place ; pendant la guerre d’Espagne, mon grand frère est mort au front en luttant contre l’envahisseur, le petit a été arrêté et fusillé. Moi j’ai réussi à me sauver avec ma nièce, Rosa et je suis arrivée en France. C’est là que j’ai fait la connaissance de Jacques. Nous nous sommes mariés il y a 10 jours et le lendemain de la noce les Allemands l’ont emmené. Il s’est échappé et il défend la même cause que celle pour laquelle sont morts mon père et mes frères. Est-ce qu’un jour je pourrai vivre en paix ou suis-je condamnée à souffrir toujours de cette manière ?

On entend des pas, elle tend l’oreille. Quelqu’un fait le signal convenu. Elle va ouvrir.

Maria : Jacques, c’est toi ?

Jacques : Oui, donne-moi une chaise, je suis blessé.

Maria : Où ? C’est grave ?

Jacques : Ne t’inquiète pas, j’ai été touché à la jambe. Mais ce ne doit pas être grave puisque j’ai pu venir seul.

Maria (elle le fait asseoir, enlève le mouchoir taché de sang et regarde la plaie. Elle appelle Rosa et apporte des bandes propres.) Rosa, Rosa, viens vite !(Rosa arrive, enfilant une robe de chambre.) Fais bouillir de l’eau, dépêche-toi, Jacques est blessé.

Rosa : C’est grave ?

Maria : Non mais il faut faire un bandage propre pour éviter l’infection.

Jacques : Ne vous en faites pas c’est juste une égratignure.

Maria : Pauvre Jacques, tu souffres mais tu prends sur toi pour ne pas m’inquiéter.

Jacques : Non, non, j’ai l’impression que ma jambe est engourdie.

Maria : A chaud tu ne sens rien, mais tu as une belle entaille.

Rosa (qui arrive avec un broc) : Tiens, de l’eau bouillante, c’est ce qu’il te faut.

Jacques : Comme vous êtes bonnes !

Maria : Allez, allonge ta jambe et ne bouge pas. (Elle nettoie la blessure et fait un bandage.)Tu as eu de la chance, un peu de plus et l’os était touché.

Jacques : Tu crois que je vais pouvoir rejoindre le maquis ?

Maria : Il te faudra d’abord plusieurs jours de repos.

Jacques : Impossible. Les camarades attendent l’ordre pour attaquer un convoi de ravitaillement et si je n’y vais pas immédiatement, ces chiens pourront passer tranquillement.

Maria : Ne t’inquiète pas, les camarades auront la nouvelle à temps.

Jacques : Et qui va les prévenir, si je n’y vais pas ?

Maria : Moi.

Jacques : Toi ?

Maria : Oui et ce ne sera pas la première fois que je trompe la surveillance de ces maudits boches.

Jacques : Non, Maria, tu ne peux pas y aller. Tu sais qu’il y a des traitres dans le village qui se méfient de toi et peuvent te suivre.

Rosa : Ne vous en faites pas. Je vais aller à la gare prendre (un billet pour Toulouse. Je descendrai à la gare suivante et je ferai mon devoir de patriote. (1)

Maria (2) : Je suis fière de t’entendre parler ainsi, Rosa. (Elle la serre dans ses bras.) C’est ainsi que parlent les femmes qui veulent la liberté pour leurs enfants.

Jacques (3) : Mais, malheureuse, sais-tu ce qui t’attend si tu te fais prendre ?

Rosa : Jamais une femme espagnole n’a reculé devant le danger.

Jacques (douloureusement) : Et moi qui suis immobilisé ici…

Rosa : Dis-moi, Jacques, qu’est-ce-que je dois faire ?

Maria : Oui, il ne faut pas perdre de temps.

On frappe à la porte. Les deux femmes font passer Jacques dans la chambre et emporte tout ce qui se trouve sur la table. On frappe à la porte à nouveau.

Maria : Un moment ! Le temps de s’habiller.

Rosa ouvre la porte. Fritz entre brutalement, un revolver à la main. En voyant les deux femmes seules, il remet son revolver dans sa poche.

Fritz : Est-ce qu’un certain Jacques Durand habite ici ?

Maria : C’est mon mari mais il est dans le Pas-de-Calais, il travaille pour la Todt.

Fritz : Depuis quand êtes-vous sans nouvelles de lui ?

Maria : J’ai reçu il y a deux jours une lettre où il me disait qu’il était transféré et qu’il m’enverrait sa nouvelle adresse.

(page manquante ?)

Julien : Mettons le feu à la maison.

L’officier : Attendez ! Avant, ligotez cette femme, qu’elle brûle avec ce maudit terroriste.

Ils se mettent à la ligoter. Arrive un autre milicien.

Milicien : Dépêchez-vous, les maquisards arrivent.

Ils sortent tous et emmènent Maria, laissant Jacques seul. On entend des coups de feu. Entre Alexandre. En voyant Jacques mort, il serre les poings de rage et essuie une larme.

Alexandre : Les lâches, ils l’ont assassiné. (Il se tourne vers la porte et fait un signe. Entrent les maquisards qui portent Rosa morte et la déposent à côté de Jacques. Alexandre sort deux drapeaux, l’un français, l’autre espagnol et en recouvre les corps.)

Alexandre : Le sang français et le sang espagnol ont été versés ensemble pour la défense de la démocratie. Devant les cadavres de ces deux héros patriotes, nous jurons de lutter jusqu’à la mort pour en finir avec l’esclavage. Garde-à-vous ! Présentez… armes ! Vive la liberté ! Vive l’union franco-espagnole !

Le rideau tombe lentement au son de La Marseillaise.

FIN

CONFERENCE Les étrangers dans la Résistance : le cas des Portugais

Après Angoulême, Bordeaux, Poitiers et Limoges l’an dernier, Cristina Climaco,

Quelques mots de présentation des conférencières et du conférencier :

Cristina Climaco et Marie-Christine Volovitch-Tavares ont coordonné le numéro double 11-12 de la revue du CERMI Exils et Migrations ibériques aux XXe et XXIe siècles en 2020 : Les Portugais et la guerre d’Espagne. Engagement militant, solidarités et mémoires disponible à l’achat sur Cairn-info.

PUBLICATION Heretar Mauthausen

Heretar Mauthausen (Hériter de Mauthausen), publié en catalan chez Pagès Editors a Lleida est un livre à deux voix : un dialogue entre un père et un fils dans la distance du temps. Llibert est le fils du déporté Joan Tarragó, qui a pu revenir de Mauthausen et a dû s’exiler en France. D’où le prénom Llibert pour symbole de la liberté retrouvée. Le père avait demandé au fils d’écrire ses mémoires. Le fils, à vingt ans, pouvait-il donner suite à la demande et affronter à nouveau les horreurs qu’il avait entendues à la maison quand il était enfant et se cachait des adultes ex-déportés qui partageaient leurs expériences ? Quelques années avant sa mort, Joan Tarragó a écrit ses souvenirs du camp de Mauthausen, sa détention de quatre années et quatre mois, sa confrontation quotidienne avec la Mort. Cinquante années plus tard, Llibert rejoint son père avec sa sensibilité, s’inscrivant aux côtés des mémoires concentrationnaires de son père.

RENCONTRE Femmes espagnoles en résistance, femmes libres et engagées en France

Les deuxièmes rencontres franco-espagnoles se tiennent entre le 30 novembre et le 4 décembre à Montpellier à l’initiative de l’association Voix de l’extrême poésie, dirigée par Manuela Parra.

Un riche programme, à découvrir ici :

COLLOQUE Epistolâtries : mutations contemporaines et nouvelles approches de la lettre

Les 2 et 3 décembre prochain, l’équipe du projet CAREXIL-FR organise un colloque international : le premier jour à l’université PAris 8 et le second à l’université Paris Nanterre.

Le colloque aura lieu en format hybride, pour se connecter à distance, il suffit de s’inscrire (gratuitement) à la page du colloque sur le site: https://epistolatries.sciencesconf.org/

Le programme détaillé :

PUBLICATION Poemas de ausencia y lejanía de Antonio Otero Seco

Les éditions Libros de la herida éditent pour la première fois les œuvres poétiques complètes du poète républicain Antonio Otero Seco, sous le titre suivant : Poemas de ausencia y lejanía. Né en Extremadure en 1905, engagé en faveur de la République, il prend le chemin de l’exil en 1947 pour fuir la répression franquiste.

La sélection des poèmes et l’appareil documentaire ont été réalisés par Edouard Pons, membre du CERMI,  Juan Manuel Bonet et  Antonio Otero San José, fils du poète.

Une tournée de présentations de l’ouvrage commence le 25 octobre à Cabeza de Buez (Badajoz), ville natale du poète et se termine le 30 octobre à la Feria del libro à Séville.

Edouard Pons a publié « Era España », un hommage à Antonio Otero Seco le 18 octobre dans la revue Contexto, que nous reproduisons ici intégralement :

“Era España”

Homenaje a Antonio Otero Seco, poeta republicano, rescatado del olvido

El poeta republicano Antonio Otero Seco (1905-1970), Libros de Herida

“Era España”, resumirían sus estudiantes en un escrito de homenaje, tras su muerte en 1970. “Con él, recorrimos los pueblos, aprendimos la tierra de España y el sabor de las naranjas de Orihuela”, decían de su profesor de civilización y literatura española en la universidad de Rennes, con el que habían descubierto a Unamuno, Machado, García Lorca, Hernández, Dalí, Buñuel y tantos otros.

Poco hablaba de él Antonio Otero Seco. Se sabía que ese “caballero triste y melancólico”, “bondadoso y retraído a la vez”, como lo recuerda su discípulo, el hispanista Jean François Botrel, era un exiliado republicano –“la encarnación de la España exiliada”, diría uno de sus alumnos. Algunos habían leído sus críticas literarias en Le Monde. Muy pocos conocían su considerable obra de poeta, dramaturgo, novelista, periodista.

Otero Seco, cuya poesía completa publica por primera vez la editorial Libros de la herida, bajo el título Poemas de ausencia y lejanía, nacido en 1905 en Cabeza del Buey, en Extremadura, comprometido desde el primer momento en la defensa de la República y perseguido por el régimen franquista, había tenido que exiliarse en 1947.

Vivió su destierro “rodeado de nostalgias, sitiado de recuerdos”, como decía, y murió en 1970 sin haber podido ver su obra publicada y sin haber vuelto a pisar esos pueblos a los que daba vida y alma en sus poemas de juventud. 

Luz, color, geometría, ritmo y movimiento, con perspectiva abierta al campo y al pasar del tiempo traducen entonces su alegría de compartir esa tierra, tan hondamente suya. La tierra, y su gente.

“Las casas son como espejos/ que hacen más oscuro el ocre /de los corrales. La cal/alterna con el adobe, /ajedrez de plano urbano/ donde disputan dos torres”, dice de Marchena.

En Álora, “Un niño rubio, descalzo, / perseguido por su sombra /rubrica el aire queriendo/ cazar una mariposa”.  En Málaga un acordeón marinero “tiene en la voz reuma y aguardiente matarratas”. En Marbella un niño mira la rueda del barquillero. “Con la ruleta giraba la bolita de sus sueños”, apunta Otero Seco.

Joven periodista, puso su pluma al servicio de la República en El Heraldo de Madrid, Estampa, La Voz, El Sol, Mundo Gráfico, entre otros. “Reportero de calle”, al estallar la guerra pasó a ser también “reportero de trincheras” y cronista de la vida y la resistencia en el “Madrid heroico”.

Su novela Gavroche en el parapeto –“medio reportaje, medio novela”, decía él;  la primera escrita sobre la guerra civil, en 1936– da la palabra a los “bravos luchadores por la democracia, la libertad y la emancipación de los eternos esclavos”, que bajo su pluma se hacen defensores de la primavera, la naturaleza, la vida, y mueren “con un mapa de España grabado en la pupila”. 

“La mañana es hermosa. De tibia primavera anticipada. Hay mucho sol, mucha alegría, en la naturaleza. Todo sonríe…Mañana de vida… ¡Qué alegres están los cielos y la tierra! … Los árboles son más bellos. Todo esta lleno de color y de vida”, escribe, relatando el inicio de un día de combates. Pero luego vendrán “las noches sin sueños, empapadas de los ruidos de la muerte” donde “no se oye más que la metralla por todos los lados”, los combatientes “llenos de fango y de sangre” y los muertos tirados boca abajo con los ojos llenos de tierra.Y cuando una bala enemiga atraviesa el corazón de un miliciano, “la sangre surge a borbotones como una furiosa floración de claveles”, y muere “con los brazos abiertos, abrazando a la tierra”. Sus compañeros le darán sepultura “junto a un olivo silvestre, entre la tierra roja, salpicada de flores”, no omite de precisar Otero Seco, como si esa tierra le devolviera el abrazo, lo arropara y lo fuera a mecer.

Arrestado el 9 de abril de 1939, acusado de “activísima campaña periodística contra el Movimiento Nacional y apología de la causa marxista” y condenado a 30 años de cárcel tras una parodia de juicio, fue recluido en la madrileña cárcel Diaz Porlier y luego en el penal de El Dueso (Santander). 

Sus poemas escritos en la cárcel son un desesperado intento de diálogo con sus compañeros de cautiverio condenados a muerte y fusilados: Pedro Luis, yuntero de Badajoz –“claro, limpio y sutil como la aurora”. “¿Hasta cuando/ este gotear constante de la sangre/ que el corazón de España está vaciando?”, le pregunta–  o Martin Manzano, alcalde de Móstoles –con “su serenidad de justo su sonrisa de niño”. “Mañana, cuando se oigan avanzar nuestros pasos/ tu estarás con nosotros porque sigues viviendo”, le dice.

Se dirige a su padre, de cuya muerte tardó en enterarse: “Estabas muerto y muerto y yo no lo sabía. / Cuando fui a buscarte/ la muerte era tu novia y yo no lo sabía”, a Miguel Hernández, su “compañero del alma”, “su inseparable”, con su grito al saber de su muerte: “¡No, que la canción se ha muerto!”, a María, su esposa, “Tu tan lejana y triste. Yo tan triste y lejano. / Tu tan próxima y clara. Yo tan claro y tan próximo. / Tu tan lejos, tan cerca… Al alcance furtivo/ de mi mano irreal, de mis labios de aire”.

Conmutada su pena en “prisión atenuada en su domicilio”, salió de la cárcel en 1941 para juntarse con su esposa y su hijo Antonio en un Madrid que definiría como “una cárcel con tranvías” en donde “el mundo se nos había arrugado y estrechado hasta convertirnos en una pequeña pelota”. Un trabajo de corredor en una empresa de perfumes le sirvió de cobertura para poder establecer contactos con los grupos de resistencia en todo el país. Las autoridades franquistas sin embargo lo sometían a una vigilancia y brutal hostigamiento constantes. 

“Varias veces al mes la policía venía a casa generalmente por la noche, a buscar a mi padre. Registraban todo el piso y devastaban la biblioteca buscando papeles. Se llevaban los libros que les daba la gana con el pretexto de que estaban prohibidos, pero existía un mercado negro de libros prohibidos en Madrid. Es probable que los vendieran”, recuerda su hijo Antonio.

Finalmente tuvo que optar por el exilio y pasó clandestinamente a Francia, en 1947.

Todo, a partir de entonces, se volvió ausencia y lejanía.

Se llevó con él toda la España que pudo, toda la memoria de lo que de ahora en adelante sería el “allí”, como una herida incurable. “Allí en España – ¡qué triste decir allí!”, le escribiría en 1959 a su amigo Antonio Salgado. En París, trabajó los primeros tiempos de peón, ebanista descargador, y todo lo que se presentaba, no en la miseria, decía, pero en una pobreza “pastueña, domesticada”, colaborando al mismo tiempo con “la emigración combatiente” y los órganos del gobierno republicano en el exilio. Fue igualmente traductor para varios organismos internacionales.

“Yo soy un exiliado sin amor ni camisa/ con los huesos pelados vestidos de horizonte… los cuáqueros me han dado el traje de otro hombre/ sin reparar que tengo un metro ochenta y uno”, escribe en su primer poema fuera de España, Dejadme

No es mera anécdota. Ese traje demasiado pequeño le significa que se ha convertido en un pelele al que visten sin siquiera mirarlo, en un número, un nadie, como “símbolo inútil de vivir en la muerte y morir en la vida”. 

Habrá que salir día tras día en búsqueda de una identidad perdida, reconstruir una historia que tenga sentido con los fragmentos salvados del desastre en una “lucha constante por encontrarse a sí mismo cada minuto del día”, como escribe entonces a su cuñado y amigo Antonio Piñeroba. “La vida es tan dura, tan llena de amargor diario, tan pródiga en ceniza”, le comenta.

Vida de desterrado que se le hace infierno como lo evoca en Mirada interior:

“Este sabor de náufrago, esta angustia de cielo …. / Este caer constante en abismos oscuros… Este mar… Esta ausencia de mar…esta agonía…/

Este rumor antiguo bogando por mis venas / Este sol… Esta sal… Esta luz… Esta presencia… / Esta ausencia… Esta voz… Este morir constante”.

Otero Seco vive la ausencia en lo más íntimo, como una sensación palpable. “Llevo tus guantes puestos, hermana madre mía /Cada malla en su trama es un minuto tuyo / como un eco pequeño de tus ojos cansados/…Mi mano en la distancia sigue sobre tu hombro/te oigo y te veo y te hablo”, escribe en el poema Madre. Y más adelante, cuando la muerte de su hermana Jacinta: “yo no puedo cerrártelos desde lejos / pero siento / la seda de tus parpados/ en el temblor de los dedos”.En 1952 es nombrado profesor en Rennes y en 1956 puede reunirse con su esposa y sus tres hijos, a los que las autoridades franquistas habían negado el pasaporte hasta entonces. “Al verlo tras nueve años de separación, sentí un cambio profundo. El exilio había cambiado su vida”, dice su hijo Antonio.

Sus múltiples colaboraciones en diarios y revistas de Latinoamérica, que más tarde ampliará como crítico literario en Le Monde, le permiten dar a conocer lo mejor de la literatura española contemporánea y adquirir reconocimiento. Pero aún así le escribe a su amigo Hermenegildo Casas, también exiliado: “Cada día tengo una nostalgia más aguda y más insoportable de España” y, todavía en 1959, le comentaría: “Yo, como tú, estoy triste. Nos falta el suelo –la tierra– y el cielo de España para ser felices”.

Pero a pesar de todo quiere creer en el futuro. “Mañana volveremos a estar sobre los mares / en los ríos que peinan su cola de caballo, / en las madres que vuelven a mostrar nuevas sendas / y en la rosa y el nido y en la cuna y la escuela”, escribe en el poema A los españoles muertos en el exilio. “Amigos: no habéis muerto. Ahora estamos nosotros / muertos por vuestra vida, vivos por vuestra muerte. / Alumbrad nuestra vida que siente la nostalgia / de vuestra muerte viva cabalgando en lo eterno”, agrega. 

Otero Seco recopiló parte de su “poesía de dolor personal y trágica solidaridad con los amigos muertos”, como la define el poeta y amigo Luis Amado Blanco, en lo que llamó una antología secreta, bajo el título España lejana y sola, que no llegó a publicar.

Cuando el 31 de marzo de 1969 el poder franquista publicó el decreto-ley sobre prescripción de los delitos derivados de la Guerra civil con anterioridad al 1 de abril de 1939, Otero pensó que por fin cumpliría su sueño de regresar a España y acudió esperanzado al consulado de España.  Allí le explicaron que el decreto no le concernía ya que sus delitos eran posteriores a esa fecha… 

Y como exiliado, desterrado, desarraigado falleció el 29 de diciembre de 1970. “Muerto de pena, muerto de angustia, muerto de España”, diría el escritor francés Jean Cassou.   

Edouard Pons